Les femmes et l’Église
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Extrait du livre de Père Guy Gilbert
Les femmes et l’Eglise, quelle place pour elles demain
Jésus et les femmes
Au temps des apôtres, les femmes sont omniprésentes, surtout dans le terrible moment du calvaire. Même Pierre, le futur pape, et les disciples s’étaient barrés courageusement pour se mettre à l’abri. Au pied de la croix, les femmes sont restées jusqu’au bout. Un seul homme a osé les imiter : Jean.
Un psychanalyste disait avec humour que l’on devrait du coup exclure tous les hommes de la liturgie du vendredi saint...
En tant que chrétiens, nous sommes toujours invités à revenir à la figure du Christ. Or il n’y a dans les paroles de Jésus aucune prescription sur le rôle de la femme. Il suffit de lire l’Évangile pour s’en apercevoir. Jésus se démarque même radicalement des pratiques de son époque. C’est l’Évangile qui a ouvert aux femmes les chemins de la liberté mais la société a eu tendance à étouffer leur voix, jusqu’à déteindre sur les pratiques de l’Église.
Les femmes ont été les premières à croire.
Le pape François insiste sur le "rôle primordial, fondamental" des femmes dans la compréhension de la foi.
La puissance spirituel des femmes
Et dans l’Église catholique ? Quelle place accorde-t-on aux femmes ?
Quand je pense que les trois grandes religions mondiales sont dirigées par des hommes, je me tape le derrière au plafond. C’est nier la puissance spirituelle des femmes. Si les États laïcs évoluent sur le sujet de la parité, de ce point de vue nos religions stagnent tragiquement. On peut toujours vanter leurs mérites et les peloter à l’infini, c’est tout juste les chloroformer un peu plus...
On loue interminablement dans l’Évangile la présence discrète des femmes autour du Christ. Même si les anglicans vont trop vite en ouvrant aux femmes les plus hauts sommets de la hiérarchie, ils sont les pionniers qui feront avancer l’Église catholique. J’ai aimé, à l’enterrement de Roger Schutz, embrasser l’anneau épiscopal d’une femme évêque anglicane. Cela m’a fait tout drôle, mais j’ai osé ce geste.
Que l’Église doive avancer me semble inéluctable. Le plus tôt sera le mieux.
Les femmes savaient
Tout au long de l’Evangile, les femmes suivent le parcours des compagnons d’Emmaüs. Ces derniers doivent statuer sur le témoignage des saintes femmes qui, au matin de Pâques, ont trouvé le tombeau vide : ragots, hallucinations ? Depuis Eve jusqu’à Marie-Madeleine, en passant par la Vierge Marie, les grands tournants de l’histoire sainte sont proclamés par des paroles de femmes. Les saintes femmes, qui les écoute ? Depuis deux mille ans, qui les écoute ?
Jésus soutenait les femmes
La présence de Jésus auprès des femmes était extraordinaire. Il ne les exploitait jamais. Il les soutenait, je crois. Jamais dans l’Évangile on ne le voit rabaisser une femme. Au contraire, lorsque la femme adultère allait être lapidée par les hommes en furie, Jésus les dispersa et releva cette femme en lui disant : "Je ne te condamne pas ; vas et désormais ne pèche plus." Il ne l’a pas jugée, il l’a encouragé, remise sur le droit chemin.
Femmes dans l’Église
En France on compte deux cent mille catéchistes. Cent cinquante mille sont des femmes, c’est à dire les trois quarts. On ose prétendre pourtant qu’elles ne sont pas formées. Je pose une question : qui assurent les retraites spirituelles et les formations, y compris théologiques ? A 80%, des femmes. Qui est majoritairement représenté dans les funérailles ? Aux préparations de mariages ? Aux baptêmes ? Les femmes !
Elles représentent aussi 70% des douze mille trois cents animateurs d’assemblées dominicales qui œuvrent en l’absence des prêtres. Cette présence des femmes dans l’Église est un fait majeur.
On dit toujours : "Attention ! Elles cherchent le pouvoir les coquines ." Rien n’est plus faux, elles cherchent simplement à être reconnues et à agir. Et nous, les hommes prêtres, n’avons-nous pas un formidable pouvoir ? Comment l’utilisons-nous ? Il serait peut-être temps d’en donner à la femme dans notre Eglise. Cela me semble primordial, car le pouvoir de service est le seul qui ait une valeur aux yeux du Christ. Au cours de mes nombreuses rencontres, j’ai constaté que beaucoup de prêtres et d’évêques voudraient un vrai partenariat avec les femmes.
A la Bergerie de Faucon, depuis quarante-six ans nous avons des éducatrices dans notre équipe de douze. Elles sont fondamentales. Mon équipe parisienne compte aussi des femmes. Elles nous amènent un plus, absolument indiscutable. Je sais au fond de mon cœur qu’elles sont irremplaçables. Sans elles je ne serais jamais ce que je suis.
Le génie féminin est nécessaire là où se prennent les décisions importantes. J’aime à penser que l’Église n’est pas "le" Église, elle est "la" Église. L’Église est femme, elle est mère, et cela est beau ! Nous devons réfléchir à ceci et l’approfondir.
"Une Église sans les femmes est comme le Collège apostolique sans Marie. Le rôle de la femme dans l’Eglise, c’est vraiment l’icône de la Vierge, de Notre Dame, celle qui aide l’Eglise à grandir !"
Le lavement des pieds de François
J’ai particulièrement aimé ce jeudi saint de 2013, lorsque le pape s’est rendu à la prison pour mineurs Roman de Casal di Marmo mener la cérémonie du lavement des pieds. C’était la première fois, parmi les douze personnes choisies (qui représentaient les douze apôtres à qui le Christ avait lavé les pieds), qu’il y avait deux femmes. Un signal fort, car le pape François montrait ainsi que les femmes étaient aussi des apôtres.
Dieu est-il masculin ou féminin ?
C’est évidemment une question qu’on nous a posée depuis longtemps, une bonne question. Je crois que Dieu est homme et femme à la fois, car les deux sont à Son image.
Aujourd’hui, des femmes souhaitent occuper des ministères. Le diaconat peut être envisageable, par exemple. Mais l’Église continue de dire non aux femmes prêtres.
Pourquoi les femmes actuellement souhaiteraient-elles un ministère que les hommes ne veulent plus ? Il y a de moins en moins de prêtres, et de plus en plus de femmes demandent à être diacres. Rarement je les ai entendue désirer le sacerdoce.
Rêvons un peu
La prudence légendaire de l’Église est certes son atout maître depuis deux mille ans, mais à ce rythme les femmes obtiendront leur place comme prêtresses dans quatre cents ans ! Rêvons un peu... J’ai constaté au cours de mes nombreuses rencontres que beaucoup de prêtres et d’évêques voudraient un vrai partenariat avec les femmes.
Imaginez une place plus importantes pour nos sœurs dans le gouvernement de l’Église. Elle en deviendrait beaucoup plus humaine, elle se rapprocherait davantage de ce bas monde.
Faisons confiance à l’Église pour ouvrir la route
Il y a cinquante ans, laver les chaussettes des prêtres et fleurir les églises était une de leurs tâches principales. Sans aller, comme les anglicans, vers une intégration immédiate des femmes dans le clergé, l’Eglise saura, je pense, progresser prudemment. Puissent le pape François et ses successeurs donner aux femmes une avancée importante. L’Eglise y trouvera une richesse partagée et une ouverture attendue et prophétique.
Le Christ a dit que là-haut hommes et femmes disparaîtront et que nous serons tous des anges. Rêvons à commencer à être des anges sur terre, dès maintenant.
Guy Gilbert